“Je stresse.” “Ça m’angoisse.”
Démêler stress, anxiété et angoisse.
Cet article est basé sur ma chronique psychologique de l’émission “À échelle humaine” diffusée par Radio-Canada le 6 avril 2024 et animée par Gabrielle Sabourin.
Quelques définitions :
Lorsqu’une personne exprime ressentir du stress, ce sentiment peut relever davantage de l'angoisse ou de l'anxiété. Alors comment distinguer ces termes proches, fréquemment utilisés de manière interchangeable ? On peut proposer 3 grandes définitions :
Le stress est principalement perçu comme une réaction physiologique à un stimulus externe, et n’est pas intrinsèquement négatif. Il mobilise des capacités spécifiques pour répondre à la situation dite stressante.
L'anxiété concerne davantage l'anticipation, on parle dans certains cas d’ailleurs d’ « anticipation anxieuse ». Elle se rattache souvent à un élément précis et identifié qui suscite une inquiétude intense avant que l'événement arrive.
Par exemple, un étudiant qui s'inquiète de son examen final plusieurs semaines à l'avance, au point de ressentir des palpitations et des troubles du sommeil, est un cas typique d’anxiété liée à l’anticipation.
L'angoisse est une sensation de malaise diffus, qui n’est pas lié à un élément spécifique et peut être extrêmement envahissant.
Par exemple, une personne se sent souvent submergée par un sentiment de peur indéfinissable, même lorsqu'il n'y a pas de problème apparent. Cette peur envahissante peut la paralyser et lui faire ressentir que quelque chose de terrible va se produire sans raison évidente. Son angoisse n'est pas déclenchée par un événement spécifique mais est une expérience persistante et diffuse qui affecte sa capacité à fonctionner normalement.
Nous pouvons distinguer deux aspects : une anxiété déclenchée par des éléments précis et l'angoisse, qui, sans objet spécifique, peut se greffer à des situations quotidiennes, reflétant un conflit interne non verbalisé.
Souvent associé à ces états, l'attaque de panique représente un épisode dit aigu, c'est à dire court dans le temps. Il est marqué par des symptômes physiques intenses, survenant brusquement. Ses déclencheurs peuvent être clairs et spécifiques ou parfois très difficiles à identifier.
L’ensemble de ces états peuvent être vécus par tout à chacun sans distinction et à tout âge.
L’amalgame fréquent de ces termes n’est pas uniquement dû à un manque de connaissance mais illustre la difficulté de les distinguer au quotidien. Ces états sont souvent étroitement liés.
Le rapport au corps :
Le corps n'est pas séparé de la sphère psychique mais sert souvent de vecteur à nos émotions quelles qu'elles soient. Il est donc évident que le corps joue un rôle central dans ces manifestations d'inquiétude et de peur. Il est notable que certaines personnes, croyant subir une crise cardiaque, se rendent aux urgences pour finalement se voir diagnostiquer une attaque de panique. Cela n'implique pas qu'il ne faille pas chercher d'assistance médicale, mais plutôt souligner l'importance de reconnaître comment le corps peut signaler des états internes souvent méconnus. Les tensions musculaires répétées, certains troubles digestifs par exemple, peuvent être causés ou aggravés par l’anxiété. S’il est toujours essentiel de vérifier une cause somatique, ces symptômes corporels peuvent aussi nous servir de signal d’alarme sur notre état psychique.
Causes et occurences de ces états :
Les causes de l’anxiété et de l’angoisse sont très diverses et varient grandement d’un individu à un autre. Cependant des tendances peuvent être repérées.
Ces états sont des symptômes d’un mal être, parfois profond et ancien, qui peut être réactivé par certains évènements de vie. Par exemple, une rupture amoureuse, des conflits dans la sphère personnelle ou professionnelle ou des événements mondiaux comme la crise climatique, ou des guerres. Ces événements viennent troubler l’équilibre et appuyer sur des peurs ou questionnements existentiels (rejet, abandon, mort, etc.).
Ainsi, notre histoire et notre environnement jouent un rôle majeur dans nos réactions. Les expériences de vie de chacun, notre éducation, nos normes sociales, fournissent une forme de grille de lecture de notre rapport au monde. Des traumatismes ou des conflits internes peuvent être à la source d’une grande anxiété.
Manifestations :
Les manifestations vont être très différentes selon les personnalités de chacun. On associe souvent une personne anxieuse avec une forme de fébrilité, de timidité même. L’image d’une personne tremblante comme une feuille vient un peu à l’esprit. Cela n’est pas du tout une représentation exhaustive. L’évitement des situations dites anxiogènes ou des émotions douloureuses est une des manifestations principales de l’anxiété. Chez certaines personnes cet évitement va se traduire par un isolement, un renfermement sur soi-même. D’autres, au contraire, vont manifester une sur-confiance voire même une certaine agressivité afin de masquer leurs tourments intérieurs.
D’autre part, les pensées associées à ces états sont souvent spécifiques. Par exemple, l’impression de ruminer la même chose encore et encore, de s’imaginer des scénarios catastrophiques, avoir de la difficulté à se concentrer ou à dormir par exemple.
Influence de l’âge :
L’âge est aussi une composante importante dans ces manifestations. Un enfant peut présenter des comportements comme l’agressivité, des peurs excessives, des difficultés de séparation, ou même parfois de concentration qui peuvent être la conséquence d’anxiété ou d’angoisse.
Chez l’adolescent, les manifestations peuvent parfois être difficiles à détecter du fait de la complexité des enjeux à cette période, mais l’isolement, l’anxiété sociale, ou les troubles du sommeil peuvent en être le signe.
Le point parfois plus difficiles pour les enfants et leur entourage, est leur capacité à discerner et communiquer des émotions complexes aux manifestations diverses. Même si cela reste difficile pour certains adultes, c’est généralement plus difficile pour les plus jeunes.
Cela va donc plus se percevoir dans leur comportement auquel on peut être attentif. Les adultes peuvent les inviter à identifier et parler de ce qu’ils peuvent repérer : le fait qu’ils aient souvent mal à la tête ou au ventre avant certains événements par exemple, ou du mal à dormir, etc. Ainsi, ils pourront saisir cette opportunité pour comprendre et partager leurs difficultés.
Les adolescents sont souvent plus au clair sur ce qu’ils vivent mais avoir aussi du mal à le communiquer spontanément. Il ne faut pas attendre qu’ils viennent vous dire qu’ils sont anxieux ou stressées mais plutôt signifier qu’ils peuvent vous en parler s’ils le souhaitent, afin qu’ils puissent saisir ou non cette porte ouverte.
Ressources :
Les activités corporelles, notamment de relaxation ou sport, mais aussi de création, ont démontré leur efficacité dans l’apaisement de l’anxiété et de l’angoisse. De même, les relations personnelles significatives, de confiance et de soutien, permettent d’apporter un soulagement aux périodes anxieuses.
Enfin, la thérapie peut bien sûr apporter un traitement des états d’anxiété et d’angoisse. Il s’agira alors à la fois d’identifier les causes présentes et passées de ces états, ainsi que les dynamiques internes et spécifiques à la personne qui se mettent en jeu. Le travail thérapeutique permet à la fois de contenir les états anxieux, de les comprendre et ainsi de les apaiser.
Cela n’est pas une mauvaise chose en soi de ressentir stress, anxiété ou angoisse. Ce sont des états qui font partie de la vie, mais leur intensité peut devenir douloureuse et handicapante, en cela il est parfois nécessaire de trouver de l’aide pour les apaiser et les traverser.